mardi 24 septembre 2019

Construire le sens


Jung maintient le rôle de l'homme en posant la question du sens : une interrogation qui ne demande rien, qui produit. 
Elle trouve sa réponse non pas dans un discours, mais dans une donnée irrationnelle, l'effet de sens
Sans savoir en quoi il consiste, j'ai le sentiment d'être dans le sens. 
Cette expérience, qui est à elle-même sa propre évidence, devient un guide, un critère auquel on réfère les choix. 
Elle ne permet cependant jamais de traiter le sens de la vie comme un objet, d'en donner une formulation. C'est au contraire, par rapport à elle que les mots ont un sens.
Refuser l'absurde, lutter pour le sens, est aujourd'hui la position la plus vivifiante. 
Ce n'est certainement pas une attitude définitive. 
Un jour viendra où elle sera dépassée, où on reconnaîtra en elle une projection, un transit vers une nouvelle forme de la conscience de soi dans la conscience du monde.

Élie HUMBERT, Écrits sur Jung (éditions Retz)

lundi 9 septembre 2019

Jung ne veut pas de "jungien"



Relisant certains extraits que j'avais mis de côté, je tombe sur celui-ci, qui me ramène immanquablement aux dernières pages de Ma vie, où Jung exprime, à demi mot, la même chose...
Jung avait compris depuis longtemps que la nature ne se capture pas, quand bien même la cage fut elle dorée, et que le piège pernicieux des mots est d'enfermer, parfois à contre gré de leur auteur.


Michel Cazenave nous invite ici, et nous rappelle, que pour ne pas "trahir" la pensée de Jung, il ne fallait jamais devenir "jungien". 

A comprendre, évidemment, céder à une idolâtrie, quelle qu'elle soit, qui fait perdre l'esprit critique et étouffe toute capacité d'analyse et de créativité.

En sortant du cimetière qui surplombe Küsnacht, ces idées ne cessaient de tourner dans ma tête. Et le souvenir confus de ce que Jung avait dit sur la liberté de chacun par rapport à lui-même.
Pourtant, pendant trois jours, ce fut Nietzsche sans cesse qui s'imposa à moi — mais ce n'était pas un hasard : « Vous ne serez mes élèves que quand vous m'aurez refusé... » Et ce n'est pas non plus un hasard — ou ce fut au contraire un hasard plein de sens — si je tombai sans le vouloir, au bout de ces trois jours, comme je cherchais autre chose, sur cette let­tre de Jung : 
« Je ne peux qu'espérer que personne ne devienne "jungien". Je ne défends en effet aucune doctrine, ...je ne prê­che aucun système achevé, fermé sur lui-même, et j'abhorre les "partisans aveugles". Je laisse à chacun la liberté de s'occuper à sa manière des faits car je prends moi-même cette liberté. »

Cette liberté, à mon tour, je me suis donné de la prendre.
Je n'ai peut-être alors rien dit de la « vérité » de Jung.
Mais à travers l'empathie de ma propre expérience — quoiqu'elle vaille par ailleurs — j'ai tenté d'interpréter, c'est-à-dire de comprendre, une expérience intérieure qui dura toute une vie.

Michel Cazenave - L'expérience intérieure

mardi 27 août 2019

Désenchantement du monde ?


Vous semblez très agacé par l'idée que le monde se serait « désenchanté » et qu'il fau­drait donc le « réenchanter »...

Exact. Si j'ai eu envie d'écrire « Chanter », c'est en particulier par désir d'en finir avec cette nos­talgie un peu aigre, ce regard négatif et dédai­gneux vis-à-vis de la modernité et du temps présent.
La vision d'une innocence première supposée m'exaspère, elle confond l'origine des civilisations avec notre origine personnelle - cette éternité « magique » où l'on nous chantait des berceuses - et cela véhicule des idéologies rétrogrades. 
Par « désenchantement du mon­de », le sociologue Max Weber, au début du XXe siècle, entendait le recul du religieux, il est vrai que le chant était lié au religieux et que ce­lui-ci occupait l'essentiel de la vie sociale. 
L'hu­manité moderne faisant reculer l'emprise du sacré, un monde de chants et de cantiques a commencé à se dissoudre. Mais le chant n'a pas disparu pour autant. Porté par un autre contexte social, culturel, politique, artistique, l'enchante­ment s'est libéré des pesanteurs institutionnelles et ecclésiastiques
Tant mieux !

Extrait d'interview de Michel Cazenave

lundi 15 juillet 2019

Approche du Soi - Elie Humbert


Approche du Soi

Il y a des jours où l'herbe pousse, où les arbres bourgeonnent, où les fleurs s'épanouissent. 
Il y a des jours où les rêves remplissent nos nuits, riches de sens et de vie intérieure révélée.
Il y a des jours bénis par Sainte Chronicité, des jours qui nous laissent entendre que nous sommes uniques, élus, attendus.
Il y a des jours où nous avons vraiment l'impression d'avancer.



Et puis il y a des jours et des jours durant lesquels il ne se passe rien. 
Rien de rien. 
Des jours où tout est banal, y compris et surtout nous. 
Morne plaine !
Pas de rêve, pas de contenus à la vie, la sécheresse, la canicule qui brûle tout. La lumière de la seule conscience raisonnante écrase toutes les ombres. 
Où es-tu mon cœur qui ne bat plus ? Où es-tu mon âme qui ne produit plus d'images ? 
La source intérieure de ton inspiration est tarie. Quel est ce nouveau désert qu'il te faut traverser ?


Douter ? Devrais-je encore douter ? Douter de quoi ? Je ne doute même pas. La vie s'écoule, banale. J'attends. J'attends sans révolte la prochaine saison de l'âme. J'attends que le sens émerge ; pour autant qu'il y ait un sens qui doive émerger. Non, je n'attends même pas.

Dormir, oui dormir, j'ai envie de dormir. Aurais-je épuisé ma capacité de révolte ? Je ne sais pas, je ne sais plus. Tout est calme.

Curieux. C'est curieux comme les mots viennent sous ma plume. Voilà bientôt deux mois que je voulais écrire un billet d'humeur alors que rien ne venait et là, en quelques minutes, alors que je voyage dans un TGV bruyant, les mots viennent, sans effort, et sans d'ailleurs que je sache vraiment où ils veulent me mener. Qu'est-ce que je veux dire au juste ? Diable, je n'en sais trop rien.


Si, je le sais ! J'ai envie de dire, une fois de plus, que tout est le chemin.
J'ai envie de dire que l'expérience du Soi à laquelle mène le chemin de l'individuation est comme la réalisation d'une pierre, une pierre qui se fait en roulant, en roulant longtemps, en roulant partout, par tous les temps, une pierre qui a tout subi, une pierre qui n'attend rien, une pierre qui est là, pleine, consistante, éternelle, une pierre qui accueille le monde.

Voilà !

  • [...] ça, c'est la première forme que peut prendre l'expérience du Soi. Nous avons, nous pouvons avoir, ça n'est pas simple, ça n'est pas facile, je vous l'ai dit , mais nous pouvons avoir, il y a en nous la possibilité que de telles choses se passent et que nous ayons cette sorte d'ami intérieur, ou cette sorte de guide ou cette sorte de lieu privilégié. 
  • La deuxième forme de l'expérience du Soi est ce qu'on éprouve lorsqu'il y a justement une sorte d'inclination, comme une sorte d'inspiration, quelque chose qui nous incline à choisir A plutôt que B, à sortir plutôt que de rester à la maison, à lire ou à aller se promener, cette sorte de ..., ça c'est comme la voix intérieure de cet autre centre en nous. 
  • La troisième forme de l'expérience du Soi est de l'ordre de la consistance. Elle se vit comme une sorte de consistance intérieure. Ce qui a fait justement parler de la pierre, ce qui a fait parler de la pierre, que l'œuvre de notre vie est comme de faire notre propre pierre, mais pas du tout dans le sens d'une pétrification, mais bizarrement, paradoxalement - nous n'en sommes pas à une contradiction ou à un paradoxe près - cette pierre, quand nous l'avons en nous-mêmes, quand elle est comme faite, cette consistance intérieure elle n'est pas un blocage, elle n'est pas une opposition, elle n'est pas une lourdeur, elle est essentiellement un phénomène de réception. Je peux recevoir le monde en fonction de cette sorte de pierre intérieure qui s'est faite et qui s'est faite en roulant de tous les côtés, qui s'est faite en étant constellée, en étant travaillée, en étant animée de tous les côtés.


Élie HUMBERT, conférence sur Le Soi, Groupe C.G. Jung de Paris - 1973 

lundi 8 juillet 2019

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« (...) La complexité de la psychanalyse jungienne tient au fait que toutes les instances psychiques sont en étroites relations les unes avec les autres. Décrire isolément un concept donne de lui une vision forcément partielle car ne tenant compte ni des rapports dynamiques avec les autres instances ni de l'ensemble du système psychique. Tout est lié, tout est en mouvement (...)»

La Psychanalyse jungienne, collection Essentialis

 Notions clés


Fonctions psychologiques


Les archétypes

 Autour de Carl Jung


Le Livre Rouge