vendredi 28 mai 2021

Jung et la solitude


Dans cet extrait, encore une fois, Jung écrit à "mot couvert" et, probablement, ne souhaite t'il pas en "exprimer trop" sur le sujet...celui qui saisit les principes de Vie, qui les reçoit et expérimente, singulièrement, franchit le seuil de l'indicible.
La solitude inhérente à l'IN (UN)-dividuation est bien en lien avec la co-nnaissance que chacun doit faire émerger personnellement.
"Enfant, je me sentais solitaire, et je le suis encore aujourd’hui, car je sais et dois mentionner des choses que les autres, à ce qu’il semble, ne connaissent pas ou ne veulent pas connaître.
La solitude ne naît point de ce que l’on n’est pas entouré d’êtres, mais bien plus de ce que l’on ne peut leur communiquer les choses qui vous paraissent importantes, ou de ce que l’on trouve valables des pensées qui semblent improbables aux autres.
Ma solitude commença avec l’expérience vécue de mes rêves précoces et atteignit son apogée à l’époque où je me confrontais avec l’inconscient. Quand un homme en sait plus long que les autres, il devient solitaire.
Mais la solitude n’est pas nécessairement en opposition à la communauté, car nul ne ressent plus profondément la communauté que le solitaire ; et la communauté ne fleurit que là où chacun se rappelle sa nature et ne s’identifie pas aux autres."
Extrait de Ma vie

mercredi 19 mai 2021

La solitude partagée...

Dans ce que j’appellerais ma quête de sens, de vérité intérieure, la recherche de mon mythe personnel selon Jung, j'ai eu la chance de croiser des personnes animées par le même "feu". 
Certains ont cheminé avec moi puis disparu, d'autres sont devenus des amis. Tous ont contribué à qui je suis aujourd'hui, et je pense pouvoir affirmer que tous vivent dans une certaine solitude assumée...solitude inhérente à cette recherche du rapport singulier à la Vie. 
J'ai fini par définir le lien, aussi fort qu'intime, qui unit nos solitudes, une affinité élective.

Cette quête défait, très naturellement, tout ce qui n'obéit pas au domaine de l'authenticité. 
Consensus, compromis, conventions de toutes sortes s'effondrent...
Il ne s'agit pas d'anarchie mais, bien au contraire, d'une "mise en ordre".

Lorsque l'on refuse de croire les apparences, d'adhérer aux pensées dominantes, de se soumettre à la doxa, deux "mouvements contradictoires" s'imposent alors à nous : 
1- La sensation d'une plénitude, d'une satisfaction intérieure, d'une réponse (provisoire ?) acquise. Un autre regard sur le monde et les autres s'édifie.
2- Simultanément, surgissent une hostilité voire un rejet de certaines personnes, parfois même proches ou "amis". Processus notoire, l'inconnu et l'incompréhension réveillent l'instinct de division et de séparation.


Ce chemin, cet engagement de vie, ne doit pourtant pas conduire à une indifférence face au "groupe", écueil fréquent, menant soit à un isolement mortifère (seul contre le monde) soit à une inflation égotique (seul digne de ce monde). 
S'il convient de se distancier de la "meute" et de son influence, ce n'est pas pour la condamner. 
Il s'agit d'établir la compréhension véritable de l'autre et de rétablir une communication authentique, expurgée de nos projections. Ce nouveau rapport à l'autre est le fruit de notre propre dialogue intérieur.

Formulé par Jung, démontré par la clinique et éprouvé par ceux qui œuvrent pour leur "accomplissement intérieur", le travail sur la psyché dépasse, finalement, le cadre du patrimoine personnel. 
Se révèle, par miroitements toujours inattendus, une part de l'humanité, un fragment "d'universel éternel", scintillements et reflets de ces fameux archétypes...
Inscrite dans "la hiérarchie naturelle des choses", cette profondeur ne sera touchée qu'une fois atteinte puis dépassée la crainte de l'affrontement de ses ténèbres personnels.
Cette lutte personnelle n'est pourtant jamais aboutie, les premières noirceurs font  toujours place à d'autres. Jung évoque un processus d'individuation, certainement pas une étape ou un stade, mais bien un phénomène dynamique discontinu.
Notre conscience ne se crée pas elle-même… Elle est comme un enfant qui naît quotidiennement du sein maternel de l'inconscient.
Symbolique de l'esprit, p.465
Le courtois comptable réalise soudainement que des pulsions inavouables l'habitent, la gentille vétérinaire découvre au fond d'elle des envies sadiques et morbides qui la bousculent, l'érudit polyglotte est confronté à des besoins d'archaïsme et de sauvagerie.
Pourquoi parfois, en moi, surgit ce qui me bouscule ?


Le jugement est une capacité innée de l'humain. Jung l'a même érigé comme un des quatre constituants de la boussole psychique.
Mais le jugement ne doit jamais devenir condamnation qui est là, un choix (écueil ?) personnel.
Quand je juge autrui, je réalise, si la première "ouverture de conscience" est accomplie, que je me juge moi-même. J'abrite les tendances coupables que je suis en train de juger. Qu'il est douloureux mais libérateur d'accepter nos imperfections, nos failles....cette acceptation, si elle est sincère et assumée est une bénédiction !
Le contraire,  s'idéaliser soi-même, idéaliser son clan ou sa nation, a pour conséquence de rejeter le mal sur l'extérieur. 
"L'ennemi est tellement bête, qu'il croit que c'est nous, l'ennemi" Desproges.
Accepter l'autre dans sa différence, c'est se libérer des projections et accéder à la plus belle faculté de l'âme, l'altérité (voir ici).

Graduellement, un autre monde s'offre à nous...non, plus précisément, nous accueillons une autre vision du monde. 

Nous accepter dans notre "caractère d'imperfection" (au regard de la totalité de notre être qui nous attend) aide alors à accepter les obstacles et échecs dans notre vie. Ils deviennent de véritables opportunités pour la transformation intérieure; ils nous poussent à l'humilité et au lâcher-prise.

La vraie souffrance naît de notre résistance au changement, pas de nos échecs

« Dans l’obstacle se trouve le chemin » 



Maj du billet du 20/01/2012