dimanche 11 septembre 2022

Archétype (11) L'anima chez Jung - James Hillman - Partie 3





Nous voici dans le troisième volet de ce très riche essai de Hillman sur l'anima. 
Lui-même écrit que le sujet ne pourra jamais être épuisé tant il évolue au rythme de la croissance humaine. 
Nous avions terminé la précédente évocation par un constat troublant, réalisé par Jung lui-même, "C'est la vie derrière la conscience...dont la conscience est issue".

Voyons maintenant d'autres facettes au moins aussi "inattendues".

6- Anima et dépersonnalisation

Le sentiment d'identité personnelle ne viendrait pas du moi mais serait donné au moi par l'anima.
La perte, provisoire, de ce sentiment est la dépersonnalisation et peut intervenir dans de nombreux cas, selon des états "toxiques" ou non.
C'est le sentiment étrange de tomber dans un fonctionnement "mécanique", d'être spectateur de sa vie, de ne plus percevoir la réalité du monde.
A distinguer de la dépression qui est une inhibition des fonctions vitales, ici nous sommes dans la perte d'implication et d'attachement à soi-même et au monde.
Un exemple fréquent est l'état d'apathie profond suite à une forte déception amoureuse...exemple pas réellement anodin puisque cet état serait lié à une "perte de lien avec l'Anima".
A ce stade de réflexion, l'anima est la force générique qui anime l'âme.
On pourrait la rapprocher du daïmon grec ou du ba égyptien.

7- Intégration de l'anima

"L'Anima et l'Animus se situe à la limite supérieure du clair-obscur de l'être...Aussi longtemps qu'ils se trouvent dans cet état, ils doivent être reconnus et acceptés comme personnalités parcellaires relativement indépendantes...ce n'est que lorsque le conscient aura acquis une connaissance suffisante...que celle-ci pourra être ressentie comme un simple fonction."  
Jung, Commentaire sur la Fleur d'Or

On passe de l'image au contenu,  de la personnification à la fonction, qui, implicitement, lui est supérieure.
Comme l'écrit Corbin, l'image féminine que rencontre le héros n'est pas son ennemi mais son ange gardien.
Voici qu'apparaît une dynamique psychique atypique dans la psychologie de Jung : Intégrer l'Anima n'est pas seulement reconnaitre son autonomie et sa "personnification" mais aussi de transformer cette personnification en fonction.
  • Il faut, en quelque sorte, percevoir la nature véritable des aspects personnels de toute personnification,
  • L'intégration est un changement de point de vue qui passe de elle en moi à moi en elle.

8- Médiatrice de l'inconnu

Au regard de ce qui a déjà été évoqué, nous pourrions écrire que l'Anima représente l'inconnu en tant qu'il est le mystère de la conscience en relation avec la nature et la vie.
Si elle n'est pas, loin s'en faut, le seul archétype en jeu dans l'individuation, elle reste cependant celui de l'appel psychologique, celui qui médiatise l'inconscient.
Et avant de devenir conscient, nous devons pouvoir savoir où, quand et comment nous sommes inconscients.
Mais il y a un écueil empoisonné à esquiver : l'Anima n'apporte pas de réponse, elle les portent, sous forme d'image !
Et c'est précisément ici que l'âme, la psyché, a besoin du logos, de l'intellect.
"C'est de la tête que sort le corps et ceci est également l'œuvre de Eve."  Jung, Psychologie du transfert

1 commentaire:

Ariaga a dit…

Comme d'habitude, clair, intéressant. Merci ami d'apporter ainsi ta pierre à l'édifice de ceux qui veulent suivre les pas de Jung. Amicales bises.