J'ai évoqué l'année dernière un livre de Michel Cazenave (voir ici) et c'est avec un immense plaisir que je vous livre mes impressions de cette dernière lecture...moi qui m'attendais à une énième présentation générale du psychologue et de son oeuvre, j'ai été surpris, touché, bouleversé même.
Ici, on est dans l'humain, le vécu, la tragi-comédie...Cazenave se livre, se dévoile, alors que ses derniers ouvrages très érudits auraient pu nous inciter à croire que l'intellect avait pris le dessus, voici qu'il nous livre une facette inattendue de lui.
Sommaire
Avertissement.............................................................. 5
I. Première rencontre................................................... 7
IL Seconde rencontre................................................. 23
III. Et puis Jung, malgré tout........................................35
IV. De quelques lectures de Jung................................ 47
V. Avec Jung et Pierre Solié....................................... 61
VI. Avec Jung et Henry Corbin................................... 97
VII. (En guise de conclusion) Et toujours avec Jung.....115
Avis personnel
Je pense que mon introduction résume bien mes impressions de lecture. Cette collection d'ouvrages de chez Oxus semble s'orienter sur une présentation assez particulière : une personnalité liée par une affinité, une sensibilité commune, un parcours de vie parle sans retenue d'une autre personnalité. On aboutit sur quelque chose de vivant, stimulant voire touchant...j'ai été touché de fait. Lire Cazenave évoquer ses profonds déboires amoureux, sa pensée résolument portée par le mystère de la vie, déceler entre les lignes un homme marqué d'un certain décalage avec son environnement qui va finalement, au gré de "hasards", trouver écho, "substance" et enfin réponses à ses interrogations auprès d'un pair (père?) que fut Jung. Cela éclaire d'une tout autre profondeur la vie de l'auteur...et cela laisse songeur, car qui n'a jamais rêvé de vivre l'intensité d'une telle communion d'esprit ?
Quelques extraits
"La rencontre de Jung...
Le Jung que je présente ici est donc celui que j'ai compris selon les aléas de mon existence. L'on entendra dès lors pourquoi je me mets moi-même tellement enjeu dans les pages qui suivent - ce qui me semblait le minimum d'honnêteté nécessaire - de sorte que le lecteur puisse y apporter toutes les corrections qu'il jugera utiles par rapport à ses propres expériences intérieures. "
"Dans un mécanisme de défense évident, je décidai donc que je ne voulais rien savoir de lui, que je ne lirais plus le moindre texte paru sous sa signature, et que, de toute façon, ma vie n'avait qu'à se dérouler comme elle l'entendait, sans que je veuille y intervenir le moins du monde.
(Merveilleuse contradiction dont je refusais de me rendre compte : après tout, n'était-ce pas là, précisément, une décision que j'avais prise ? Dans les instants où, malgré tout, j'en nourrissais l'obscure intuition, je m'en tirais par un tour typiquement mercurien, en arguant de ce que j'avais décidé de ne plus rien décider, et que je laissais dorénavant advenir ce qui « voulait » m'arriver.)
Très bêtement, je n'avais pas prévu que Jung se réimposerait à travers, justement, cette apparente suspension de toute volonté quelle qu'elle fût. "
"En avais-je fini avec Jung ?
Je faillis presque le croire... Mais la vie se charge vite de vous faire changer d'avis, et j'eus tôt fait de découvrir qu'il est de ces destins auxquels on ne peut échapper, ou plutôt des « destins », des couleurs de l'existence, des « notes » fondamentales avec lesquelles on n'en a jamais terminé de s'expliquer - et qui vous marquent au plus secret de votre expérience.
Ainsi, de la disparition, des années après que j'avais connu Corbin, de celle qui avait été la compagne de ma vie, et qui avait marqué l'une des raisons de ma mélancolie de jeune homme.
Si on ne l'a pas vécu soi-même, peut-on deviner ce que signifie ainsi la mort de l'être le plus cher au monde, de celui qui vous donnait votre sens et vous indiquait la direction des Cieux dont elle vous faisait pressentir comme vous en étiez par nature un habitant naturel ?"