mercredi 10 août 2022

Archétype (9) - L'anima chez Jung - James Hillman - Partie 2

Reprenons le travail de synthèse entamé ici.
Hillman, qui nous a quitté il y a un peu plus de 10 ans (27 octobre 2011) est souvent considéré comme LE continuateur de la pensée de Jung outre-atlantique sur le thème des archétypes.
Nous avions précédemment passés au crible les notions de contrepartie sexuelle de l'homme, de l'Eros et du sentiment pour finalement conclure avec Hillman que l'Anima ne pouvait pas y être contenue de manière satisfaisante.

4- Anima et féminin

Hillman fait un constat simple et solide : si l'Anima a une dimension archétypale reconnue (Jung l'appelle parfois "l'archétype du féminin"), elle ne peut être seulement dédiée à la psyché masculine.
Nous butons face à l'interprétation populaire du concept de Jung mais Hillman nous rappelle que le même comportement est appelé Anima chez l'homme et nature féminine ou ombre chez la femme...

Il émet l'hypothèse que les femmes sont, par nature, âme si l'on accepte le lien entre âme et féminité. Mais le sentiment intime de l'âme n'est pas donné à la femme.
Le travail avec l'Animus qui est une conquête de l'esprit (Logos) fait ressortir que l'âme est bien la sphère de leur besoin et donc non acquise de fait. 
L'esprit actif n'est pas l'imaginal et les deux sont nécessaires à la constitution de l'âme !
 
Hillman conclue ainsi :
"L'Anima devient ainsi le véhicule originel de la psyché ou l'archétype même de cette dernière".
Anima Mundi: Jung y la dupla ánimus-ánima

5- Anima et psyché

Anima comme archétype de la psyché, Hillman s'appuie sur plusieurs constatations :
  • Jung associe beaucoup d'images à l'Anima mais garde hors de ses limites la mère. L'Anima est alors source de croissance qui éloigne de la nature. Dans l'alchimie, ce processus spécifique, appelé opus contra naturam relation qu'entretient l'adepte avec l'anima-soror, est la perspective de compréhension psychologique à opposer à la compréhension naturaliste des évènements psychiques.
  • Rappelons le lien étroit qu'établissait Jung entre Anima et Mercure, entre la "personnification de l'inconscient collectif" et "l'archétype de l'inconscient". Hillman exprime que leur identité est d'autant plus étroite que la différenciation esprit/âme n'est pas faite. 
  • Sur le plan alchimique, l'anima s'apparente à Luna et Regina. Jung s'est attardé sur Regina et conclue par le fait qu'elle est conjonction simultanée de la contrepartie du corps et de la contrepartie de l'esprit. "L'anima n'est peut être qu'une seul parmi les ingrédients de l'alchimie du processus psychique.Mais du fait de son rôle conjonctif (anima mercurius), elle constitue ce facteur au travers duquel tout se produit de façon psychique". Nous trouvons même l'idée chez Jung que plus l'Anima parvient à sa réalisation, plus l'existence psychique devient réalité.
  • Jung a construit ses théories sur cinq pulsions instinctuelles (contre, en schématisant un peu, une seule pour Freud) : faim, sexualité, activité, réflexion et création. La notion de réflexion, "se pencher en arrière" et "se tourner vers l'intérieur" est en forte corrélation avec l'anima. "La faveur des images intérieures...correspond à l'intériorisation par le sacrifice décrite par Jung, nécessaire à la conscience psychique". Dans ses séminaires anglais, Jung parle de "l'esprit de nature", où nous ne pensons pas mais sommes pensés, et il affirme que cet esprit est une propriété exclusivement féminine.  "...la réflexion est un acte spirituel qui va à l'encontre du processus naturel; un acte au moyen duquel nous nous arrêtons pour évoquer quelque chose, former une image, puis entrer en relation pour ensuite en finir avec ce que nous avons vu. Il faut, par conséquent, la comprendre comme un acte permettant de devenir conscient". Ou encore, parlant de l'anima "C'est la vie derrière la conscience...dont la conscience est issue"

Les archétypes