jeudi 27 janvier 2011

Advenir à soi-même...

 « ...Ce n'est pas moi qui me crée moi-même : j'adviens plutôt à moi-même » Jung, Les racines de la conscience


Quand j'ai commencé à lire Jung, cette phrase en particulier m'a interpellé. Il est souvent question de laisser advenir dans le dialogue intérieur. Advenir, un verbe peu usuel, au fait, que signifie t'il ?
Sur le plan étymologique, il dérive du verbe avenir qui pouvait avoir plusieurs sens : 
– arriver, venir, survenir, se produire ;
– convenir,
– réussir, parvenir à, s'approcher de.

Cette définition contemporaine du verbe advenir me plaît :"Se produire, comme une chose possible, mais de manière non absolument prévisible, quoique attendue". Cela me fait penser à une spirale dans laquelle nous tournons, avec la possibilité de toucher le centre un jour.


Advenir s'inscrit, me semble t'il, dans le champ de l'expérience, notion si chère à Jung dans toute son oeuvre.  Il s'agit d'éprouver et surtout pas de prouver. Faire l'expérience, en fait, est même bien au delà de ce qu'on éprouve, c'est aussi et surtout un risque...risque d'être renversé voire bouleversé. C'est avant tout la rencontre avec l'inconnu et donc une source de peur irrationnelle. La plupart en restent là, dans cette seule certitude de la peur ressentie...après tout, quoi de plus humain. 
Et ils ont raison d'avoir peur car la plongée en soi, comme nous le verrons plus en détail dans ce blog, c'est la reddition du Moi, cette instance psychique qui est organisateur de l'expérience consciente et également au centre de la personnalité. Il est également responsable de nos sentiments d'identité et de continuité personnelle. Pour faire simple, le Moi, c'est ce qui apparaît en première expérience comme nous. Mais alors, reconnaître en lui un usurpateur est une mort à soi ? oui !


Si les choses s'arrêtaient ici, nous serions finalement condamnés à souffrir, à avoir peur mais sans besoin de sens, dans un confort absolu...beaucoup s'en contenterait mais heureusement (ou malheureusement, tout dépend du point de vue), la nature nous a fait tout autre. En effet, au plus profond de chacun, il y a une lumière, porteuse de vie, libératrice qui n'obéit qu'à sa propre loi. Entendons nous bien, cette phrase peut être perçue comme emplie de mysticisme mais je reste toujours dans le domaine psychologique...Jung a décelé, par l'expérience clinique, cette présence au coeur de notre psyché. Mais comme elle niche dans les couches les plus profondes de l'inconscient, elle est indéfinissable, inconnaissable, bref, c'est un concept limite : le Soi. La seule certitude réside dans les effets qu'il produit en nous. C'est une délivrance qui va à l'encontre de notre volonté, de nos convictions établies...elle ne se produit pas par la conquête et la maîtrise du Moi mais par son dépassement, par la reconnaissance de ce "tout autre" qu'est le Soi. 
Il est troublant de parler d'autonomie et d'objectif pour des choses qui n'appartiennent pas à la conscience et nous aborderons plus tard ce sujet mais si nous devions retenir une chose, c'est que empiriquement, le Soi cherche à fonder la totalité en nous qui signe la fin du conflit violent entre la conscience et l'inconscient...telle est la véritable source de bonheur, de sens et de vie !
Fort de cette conviction, qui, encore une fois, ne peut qu'être théorique et rester niché dans le cerveau mais doit être éprouvée, nous trouvons la confiance qui tait les peurs, la force qui nous permet alors de laisser advenir.

A bientôt

Jean

8 commentaires:

Ariaga a dit…

Ce sont des commentaires comme celui que tu as fait sur mon blog qui me donnent un frémissement d'envie de recommencer à écrire. Je pense que cela va se faire doucement si je peux retrouver le "sens" de ma démarche. Vraiment bravo pour ce blog inspiré par la pensée de Jung et j"espère que nous nous nous rencontrerons sur le chemin ...

Benoit Mouroux a dit…

Merci pour ton commentaire.

On ne peut donner comme tu le fais sur ton blog sans marquer des temps de pause...des temps où l'incommunicable le reste pour opérer son travail, discrètement.

A très bientôt

blogruz a dit…

Bonne chance à "Carlitou".
Il me semble qu'on pourrait rapprocher cet "advenir" de la formule, empruntée à la sibylle, que Jung avait fait graver au frontispice de sa maison et sur la dalle du caveau familial,
VOCATVS ATQVE NON VOCATVS DEVS ADERIT
"Appelé ou non, Dieu sera présent"
Le même verbe adsum apparaît dans la réponse prêtée à Jésus par les anagrammistes, après la question de Pilate :
QUID EST VERITAS ?
VIR EST QUI ADEST ?
Qu'est-ce que la vérité ?
C'est l'homme qui est là.

Benoit Mouroux a dit…

Merci pour ces apports.

Effectivement, je ne l'avais pas vu mais cette citation répond parfaitement au sens que je mets sur "advenir".

nicole a dit…

Merci Jean ,
j'aime beaucoup ton blog qui est un mixte d,information et de réflexion,

c.est agréable de te lire, c'est clair et cela m'aide moi-même à préciser mes avancées sur le chemin.

Je serai une lectrice assidue et si quelque commentaire advient...;o) je les partagerai.

amicalement , nicolem alias luciole ;o)

Benoit Mouroux a dit…

Merci du clin d'oeil Luciole ;)

Anonyme a dit…

Cette fois je pense dire Cher Jean (j'ai de la peine avec les formule de politesse non par impolitesse, mais par impulsion, bref

adevenir est un verbe conjugué qu'aux troisièmes personnes et au participe passé. J'aime ce verbe qui exprime ce qui viendra au-delà de toute volonté, j'aime l'idée que quelque part la vie se déroule sans ma participation qu'elle a une sorte d'autonomie et qui nous fait finalement dire "on verra bien"

Cile

Benoit Mouroux a dit…

Et oui Cile, une autonomie implique en effet une certaine confiance et laisser aller (au sens noble du terme)...pour autant, je crois qu'une coopération consciente est nécessaire ou au moins très utile.

Jean