Dans la rubrique où nous levons le voile sur l'intimité de Jung, impossible de ne pas aborder la tour de Bollingen, cette construction extérieure accompagnant une certaine construction intérieure, comme l'a magistralement démontré Michel Cazenave...
A l'extérieur de la tour, dans le jardin, placée devant le lac, se tient la pierre cubique. Jung entama la taille pour ces 75 ans :
« En 1950, j’ai élevé une sorte de monument de pierre à ce que la tour représente pour moi … La pierre se trouve en dehors de la tour, dont elle est comme une explication. » (Jung, Ma vie, p269)
Trois faces de la pierre sont gravées en grec et en latin, de citations et de pensées de Jung, dont il dira : « Ces paroles me vinrent à l’esprit l’une après l’autre, tandis que je travaillais sur cette pierre» (ibid, p271).
Sur la première face, il reprend la dédicace en latin du Rosaire des Philosophes, texte alchimique : « Ici se trouve la pierre ordinaire mais, quant au prix, pas chère. Les ignorants la méprisent, d’autant plus les savants l’admirent. »
Sur la seconde face, Jung est figuré sous les traits de Télésphore, un nain portant une lanterne et vêtu d’une pèlerine à capuchon, entouré d’une inscription en grec :
« Le temps est un enfant qui joue comme un gamin penché sur un jeu de table, le royaume de l’enfant. C’est Télésphore qui vague à travers les régions obscures du cosmos et qui, pareil à une étoile, resplendit des profondeurs. Il montre le chemin vers les portes du soleil et vers le pays des rêves. »
Sur la troisième face, un texte en latin attribuée au Rosaire des philosophes :
« Je suis un orphelin, seul. Pourtant on me trouve partout. Je suis un, indivisible, mais opposé à moi. Je suis à la fois jeune homme et vieillard. Je n’ai connu ni père ni mère. Parce qu’on doit me tirer de la profondeur, comme un poisson. Ou parce que je tombe du ciel comme une pierre blanche. Je vague à travers les bois et les montagnes, mais je suis caché dans l’intime de l’homme. Je suis mortel pour tout le monde. Pourtant la mutation des temps ne m’effleure pas. »
D'autres sculptures, annotées ou non, habitent le jardin et nous aurons l'occasion d'y revenir.
La tour de Bollingen, dévoilée au fil des visites certes privées mais nombreuses, l'opus colossal du Livre rouge, que la famille a préservé jusqu'en 2009 , sur réticence de Jung lui-même à tout projet d'édition, voici que l'on pense avoir maintenant accès à l'ensemble de l'intériorité du maître zurichois...il est pourtant encore un pan tenu secret par la famille jusqu'à aujourd'hui, c'est la pièce de la tour, entièrement peinte de figures et symboles...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire