Au gré d'une lecture, je découvre la proposition de Michel Jouvet sur la fonction des rêves et je suis immédiatement frappé par la similitude avec les théories jungiennes. Depuis, je me suis intéressé au personnage fascinant et passionné, reconnu par ses pairs comme l'un des plus grands neurobiologistes, spécialiste du sommeil et surtout "découvreur" officiel du sommeil paradoxal. J'invite le lecteur à aller fouiller dans ses ouvrages éclairants et accessibles pour approfondir les lignes au dessous (sa bibliographie).
Tout d'abord, gardons à l'esprit que nous sommes ici en territoire biologique donc ancré au soma et même si les théories de Jouvet flirtent souvent avec le psychique, les approches conservent une limite rationnelle compréhensible mais, selon moi, lacunaire.
Constats préliminaires :
Tout d'abord, gardons à l'esprit que nous sommes ici en territoire biologique donc ancré au soma et même si les théories de Jouvet flirtent souvent avec le psychique, les approches conservent une limite rationnelle compréhensible mais, selon moi, lacunaire.
Constats préliminaires :
- le sommeil est découpé en cycle d'environ 90 minutes et 20 minutes de ce temps est consacré au sommeil paradoxal. Ces cycles sont "universels", commun aux hommes de toutes origines ethniques et sociales,
- le sommeil paradoxal est nommé ainsi car l'activité cérébrale est la plus proche de celle de l'éveil, d'où le paradoxe,
- ce sommeil paradoxal s'accompagne de plus d'une accélération cardiaque et de mouvements oculaires rapides. Ces "signes" semblent corrélés avec l'intensité onirique.
Il apparaît que le rêve est donc "programmé" dans la nature biologique de l'homme. Reste à définir alors sa nature et sa fonction....
Jouvet postule le fait que le rêve est le troisième état du cerveau...ni en sommeil, ni en éveil, il répond à un autre mode de fonctionnement (anecdote intéressante, cette intuition lui est venue suite à une lecture d'un passage des Upanishad).
C'est à la fois simple et lourd d'implication. L'état de veille permet la vie sociale, l'état de sommeil permet la récupération physique et "l'intégration" intellectuelle...l'état de rêve devrait donc constituer une phase aussi fondamentale de la vie.
Sur ce point, Jouvet affirme que l'homme peut vivre sans rêver, en étant privé de sommeil paradoxal...ce qui contredit quelque peu la fonction qu'il propose du rêve (nous allons l'aborder) et que je critique en établissant l'hypothèse que si le sommeil paradoxal semble nous indiquer l'état de rêve, rien ne nous dit que cet état peut se produire hors toute "lecture physique possible" (hypothèse en voie de confirmation par les dernières recherches) d'après ce que j'ai lu.
Fonction du rêve
Fonction du rêve
Jouvet fait une proposition audacieux, qu'il argumente avec forts appuis cliniques et scientifiques qui me dépassent et dont je vais épargner le lecteur.
Un indice quand même : ce sommeil paradoxal n'apparaît que chez les animaux dont le développement neuronal est limité (le capital de neurones est rapidement atteint dès le jeune âge). Les rêves seraient donc là pour compenser ce défaut de neurogenèse, afin d'harmoniser constamment la vie extérieure et l'attente, génétiquement programmé, de la vie intérieure...chaque individu répondrait donc à un développement qui lui est spécifique et inscrit dans son code génétique, le rêve lui permettant constamment d'ajuster les choses. Le rêve jouerait donc un rôle-clé dans le maintien de notre individualité psychologique.
Jung décrit le rêve comme porteur d'un dynamisme de changement intérieur, d'un processus de transformation de la personnalité présent dans l'inconscient humain. Quelle étrange similitude !
On pourrait aussi mentionner l'existence de l'inconscient collectif, la présence, dans le psychisme humain, de structures innées, les organisateurs inconscients, pouvant sur le plan psychique se comparer au code génétique sur le plan physique, constituent des facteurs d'auto-guérison, des forces de transformation présentes dans l'inconscient, visant à nous faire advenir à nous-mêmes.
J'ai le sentiment que, dans deux domaines spécifiques, la convergence de géniales intuitions est flagrante.
Pour finir, une interview de Jouvet, où tout bon amateur de psychanalyse tiquera à quelque reprise mais qu'importe, restons ouverts....
16 commentaires:
Bonjour,
Pour continuez dans cette direction, je ne sais pas si vous connaissez l'EDMR introduit en France surtout par David Servan-Schreiber.
Il semblerait que l'utilisation de technique de mouvement occulaires pourrait reproduire des fonctions du sommeil paradoxal et aider a equilibrer des traumatismes.
http://www.dailymotion.com/video/x76cq8_emdr-une-nouvelle-approche-psychoth_news
http://www.dailymotion.com/video/xb2il1_guerirautrement-emdr-les-reponse-en_webcam
http://www.emdr-france.org/spip.php?article5
Bonjour Anonyme ;)
Je connais très bien l'EDMR...et je confirme son efficacité purement pratique à l'instar de la PNL d'ailleurs.
Merci d'ouvrir les perspectives.
Jean
Jung attribuait plusieurs fonctions possibles aux rêves dont celle d'être régulatrice....donc sans rêve nous serions bien mal foutus je crois...;o)
Merci pour la référence, la similitude des conclusions est étonnante en effet.
amicalement nicole
Petite question en rapport avec les mouvements occulaires:
Les rêves lucides sont-ils une forme d'imagination active directement vécue dans le rêve ?
Bonjour Kelilan,
Rêve lucide et rêve tel qu'entendu dans ce billet n'ont rien en commun.
L'imagination active que Jung proposait pour certains patients en fin d'analyse est une technique très particulière, qui peut en effet se présenter comme rêve lucide en gardant à l'esprit que le but est de se relier intimement à l'inconscient tout en conservant un moi solide et ancré pour supporter l'intensité du contact...de plus, un rêve lucide ne signifie pas que nous gardons prise sur lui mais que nous conservons une part consciente du vécu.
Avis tout personnel, la notion d'imagination active est à étudier avec précaution me semble t'il...les risques sont élevés car nous ne sommes pas dans la méditation ou le lâcher-prise. C'est "très électrique" comme disait Von Franz.
Amicalement
Bonjour,
J'ai le souvenir d'une émission de radio, de France Inter ou de France Culture, intitulée, je crois, "1991 , l'année palindrome", à laquelle participait Étienne Perrot. Il y fut largement question des recherches et des théories du professeur Michel Jouvet (dont on entendit une interview sur le sujet). Comme on lui demandait son avis sur cette approche des rêves, Étienne Perrot déclara (en substance) que, s'il était sans doute intéressant de savoir de quoi se composait l'instrument, comment il fonctionnait ; pour sa part, ce qui l'intéressait vraiment était d'être le musicien qui en joue, l'interprète, plutôt que d'être dans le rôle du luthier qui le démonte. J'avoue que c'est également ce qui me semble être l'essentiel. Ne sommes-nous pas sur-saturés d'approches scientifiques trop souvent réductrices, ne sommes-nous pas victimes d'un regard qui tend à maîtriser, à posséder, à découper pour mieux posséder, pour éviter de nous abandonner à l'Inconnu qui veut s'exprimer dans un langage souvent poétique ou oraculaire, un langage libre des réductions scientifiques. Bien des chemins mènent à Rome et l'approche neuro-biologique n'est pas mauvaise en soi, peut répondre à notre curiosité naturelle, nous convaincre peut-être que le rêve n'est pas un épiphénomène, marginal et négligeable, mais comme tu le rappelles très justement dans ta note, Jean, il ne faut pas demander à cette approche ce qu'elle ne peut pas donner. :-)
Amezeg
Merci pour cette réponse !
Songeons que tout est de la nature du rêve... Amitiés
Si tout est de la nature du rêve, j’en déduis donc, Phène, que votre proposition, elle aussi, est de la nature du rêve.
Quelle importance, à votre avis, doit-on alors lui accorder ?
Cela me laisse perplexe… :-)
Amezeg
En réalité, aucune. Mais tout dépend de la valeur que l'on accorde au rêve... ;)
Ayant finalement renoncé à la noter moi-même, c’est TRES EXACTEMENT la réponse que j’attendais...Elle va de soi, n’est-ce pas ? ;-)
Je devais rêver un peu, j’ai oublié de noter mon pseudo au bas de mon précédent commentaire… :-)
Amezeg
Je suis d'accord avec le commentaire d'Amezeg, on ne peut demander à cette approche plus qu'elle ne peut donner...
Oui certes, comme je le précisais, c'est une approche lacunaire mais je trouve que c'est la seule actuelle, à ma connaissance, qui pourrait réconcilier deux mondes.
Je suis tombé par hasard sur cette phrase de Jung aujourd'hui : "Le rêve est la réaction naturelle de l'autorégulation de notre système psychique"...comme elle s'associe étroitement à la proposition de Jouvet.
Jean
c'est plus simple encore : l'etat de veille permet la vie sociale, l'etat de sommeil la recupration physique et le reve la vie spirituelle, c'est adire la com avec notre incs
Notre existence pourrait être un rêve...
L'observation du comportement incompréhensible des particules élémentaires, qui composent une partie de notre univers perceptible, pourrait mieux s'expliquer.
A notre mort nous nous éveillons d'un beau rêve ou d'un cauchemar mais, enrichis de l'expérience d'une vie qu'il nous est donnée d'éprouver durant la méditation ou le sommeil de "l'âme pure" qui se situerait dans une dimension différente.
Tout en étant immortels, la quête pour découvrir la source et l'utilité de la conscience resterait un défi inachevé.
Les mondes imaginés et vécus en songes seraient des outils de recherche qui permettraient de centraliser les hypothèses nées des réflexions qu'emmèneraient à nous poser chaque expérience.
Il devient certain que notre inconscient à l'oeuvre, influe sur l'univers, autant que nos actions réfléchies (s'il en existent ).
Cependant, les univers créés par nos rêves sont innaccessibles à nos pensées conscientes et les rendent d'autant plus intéressants.
L'espace, le temps et la matière abolis nous ouvrent à une liberté d'expression que le raisonnement interdit.
Dans ce " Tout est possible ", l'âme n'a plus d'entrave et peut à loisir expérimenter sans fin toutes les émotions contenus par la dimension de l'univers qu'elle peut créer, occuper et ressentir en méditation ou en rêve.
Un esprit peut-il rêver le contenu de ce que nous percevons comme une vie et se réveiller au moment de quitter le corps qu'il occupait dans son rêve ?
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